Haro sur le corps

ou l'histoire

du gentil voile et de la méchante pub

Destruction de la volupté, assêchement esthétique, les extrêmes, là aussi, se conjuguent pour réduire le corps, ici à une idée, là à des programmes de formes numérisées.

Il faudrait un médium, celui de l'extrêmement beau, de l'indicible fragile au firmament des sens, dans son soupir, certainement pas au bout du string, bleu sur fond rose, plutôt le déhanchement d'un dos guitare, où le galbe du golfe d'ombres cher à Arthur R et ses lanciers, sculptures du temps qui passe, celles que se donne l'époque en guise de statue et de sa commande par le seigneur local.

Aujourd'hui, ce dernier est une firme et sa renommée se condense dans ces armoiries modernes : l'effigie d'une gracilité, le clin d'oeil d'une complicité urbaine, au creux de ces images gorgées de sens parfois trop crochus.

Sauf que ces temps-ci cette grammaire connaît des râtés qui ne font pas dans la dentelle mais privilégient plutôt le gros plan bien gras. Vite stigmatisée par ceux-là mêmes qui récusent non pas cette façon de montrer mais toute pub en crachant leur haine dans les gribouillis, orthodoxes, de la révolte chic alors que la pub c'est aussi une fenêtre sur d'autres imaginaires, qui ne sont pas tous édulcorés. Par exemple, lorsqu'ils arrivent à jouer autre chose de plus serein. Comme cette pub jouant à chat perché dans le métro et dans un stade, ou celle de cet appareil photo dont les formes saisies arrachent un sourire à l'ennui d'une jeune femme en papier mâché, roulée comme une cibish, disait Léo F, en attente d'une amulette....

Il existe donc, au creux des sanglots longs de cet automne oligopolaire (et non multipolaire...), une lutte féroce entre les innombrables Tartuffes de l'intégrisme intégré, fusion progressive des extrêmes enserrant, étouffant, les corps et assêchant, aspirant les âmes, et quelques Don Quichotte (ceux du MNM par exemple) tentant de penser l'âme urbaine, ce rêve immense se ressourçant au détour d'un coin de rue, dans le geste vif d'une passante ou le regard étrange d'une ensorcelleuse qui nous hèle du dedans de son affiche comme si nous étions un sceau d'images intimes remontant avec lenteur, lourdeur ou légèreté, afin de boire et d'imbiber en retour un peu de notre océan intérieur.

Mais il arrive que le lien que je tisse avec ne soit pas telle qu'il empêche ma liberté de se renouveler. Je n'ai donc pas besoin de ces nouveaux redresseurs de torses pour me dire ce que je dois (faire) cacher ou montrer (à tout prix). La mutilation ou le désir de salir ce qui est beau ne peuvent pas donner le là ou se poser en gardiens des apparences. Il serait temps d'en rire. D'une façon gargantuesque. Et d'un pas de danse. Sur une corde. Sans fil. Celui de la connivence tranquille.

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Mouvement Néo-Moderne